Débriefing...

Publié le par Guillermo G

Retour sur la journée de ma vie. Celle dont je me souviendrai toujours quoiqu'il advienne (excepté un Alzheimer aiguë qui m'empêcherait même de reconnaître la voix chantante de Francis Cabrel).

Retour sur une expérience assez extraordinaire dont je me remets peu à peu et dont je commence à peine à prendre conscience.

Pour cela, il est utile de revenir une année en arrière, à la suite d'une représentation chorale d'un spectacle gravitant autour de l'art. Dans ce mélange style pot-pourri, de tout ce qui est englobé dans le terme "art", on m'avait demandé d'ajouter ma pierre à l'édifice en chantant deux trois chansons de ma composition. Et puis un beau jour, certains comédiens faisant faux-bonds, on avait ajouté à mon arc, quelques cordes non négligeables. Je devais écrire deux textes à réciter devant un parterre d'anonyme, apparemment étranger à mon art. Et ce fut une petite révélation (je dis petite, parce que la salle était loin d'être remplie). Certains compliments avaient fusé auprès de la metteur en scène. Du coup, après quelques jours de réflexion, elle m'avait fait LA proposition, celle qu'on ne peut pas refuser.

"Dis donc, ça te dirait pas de faire un spectacle en solo ? Une sorte de one man show où tu associerais tout ce que tu sais faire ? Du chant, de la musique et des sketchs ?".

Moi, ravi de cette vision, j'avais dit oui. Ensuite j'avais réfléchi...

Et puis, j'ai bossé. Pas non plus comme un dératé, mais enfin, j'ai bossé. J'ai esquissé un petit spectacle sous son regard attentif et bien aiguisé. Et nous avons décidé d'appeler cela "Viens danser... du rire aux larmes".

J'ai pris un nom de scène. Il était tout trouvé, ce serait Guillermo. Et puis j'ai eu peur. J'ai stressé. Et puis je me suis mis à languir le 24 mai.

Et dire que c'est arrivé vite n'est pas un euphémisme. A peine le temps de terminer de peaufiner deux trois trucs que déjà, le rideau se levait (enfin presque, puisque j'avais décidé de passer sous ledit rideau).

Mardi 24 mai 2011, le jour où j'ai réalisé un de mes rêves.

Je me suis réveillé avec une sorte de sentiment mitigé. J'avais peu dormi, il est vrai. J'ai fait attention à mettre le pied droit avant le gauche, c'était le jour à se faire avoir par de la superstition de bas étage.

J'ai avalé un petit déjeuner succinct. J'ai ramassé les quelques accessoires dont j'aurai besoin plus tard, sur scène, et je me suis dirigé vers la salle de théâtre. 

J'ai passé la matinée à prendre des repères sur cette petite scène du théâtre de la Plume, à l'acoustique, il faut le dire, exceptionnelle. J'ai mis des gommettes à certains endroits, des bouts de Scotch fluorescent. J'ai senti le stress grimpé légèrement au fil des minutes qui s'égrenaient jusqu'à l'heure fatidique de 20h45.

Et puis le régisseur est arrivé. Il a réglé les lumières, transformant mes sketchs papiers en véritable spectacle son et lumière. En vrai pro, il a fait de mes idées une réalité, et m'a rajouté un peu de pression. Il fallait être à la hauteur.

Je suis reparti chez moi prendre une douche, avaler un petit quelque chose, tenter de faire une sieste (tentation avortée) et éviter de relire mes notes.

Le soleil se faisant plus faible et moins intense (ce qui n'était malheureusement pas le cas de la chaleur), je me suis remis en route pour vivre l'expérience la plus folle de toute ma vie.

Je suis entré dans le théâtre en tant qu'artiste. Première sensation bizarre. Je n'étais pas artiste. Enfin pas pour moi. J'étais toujours le même jeune homme qui raconte des bêtises et aime bien manipuler les mots pour les rendre un peu plus drôle et un peu plus audible.  J'ai positionné mes affaires dans une loge. Un miroir devant moi, éclairé par quelques loupiotes. Bêtement, je me suis dit que d'autres cent fois plus talentueux avaient vécu cet instant de première fois, où l'on n'est rien, et où on aspire à être à peine un peu plus.

On m'a maquillé, légèrement. Je me suis changé, prêt à intervenir à tout moment.

J'ai entendu un petit cohue dans la rue. J'ai reçu les derniers messages d'encouragement de tous ceux qui n'avaient pas pu venir et qui pensaient à moi. J'ai reçu des photos de la rue, pleine de spectateurs, envoyé par mon frère, premier fan du jour. J'ai entendu la cacophonie des gens qui entraient petit à petit pour s'installer. J'ai entendu leurs anecdotes, leurs premiers rires qui n'avaient rien à voir avec moi. Leurs questions sur ce qu'ils allaient découvrir ce soir.

J'ai senti ma gorge se nouer légèrement, mon coeur s'emballait un peu. Mais de façon presque normale. Sans que ça tourne à l'obsession ou à la maladie. J'étais traqué mais pas paralysé. Je languissais d'apparaître devant eux.

Et puis l'heure est venue. On est venu me chercher. On m'a demander de suivre le régisseur jusque derrière le rideau. Les lumières se sont baissées, j'ai entendu le frémissement dans la salle. On a lancé la musique d'intro et c'était parti. Deux heures pleine de spectacle. Deux heures pleines à dévoiler aux gens ce que j'avais fait pendant un an. Le travail, les rires, les sourires, les émotions que j'avais voulu transmettre.

Deux heures plus tard, j'étais lessivé, éreinté, anesthésié, dans un autre monde. Je voyais des gens debout devant moi, applaudir à en perdre haleine. J'avais un gros bouquet de fleurs dans les mains, des roses avaient jailli du public. Des strings aussi (je vous rassure, j'avais des amies dans la salle qui avaient fomenté ce mouvement surprise).

La chose dont je me souviendrai toute ma vie, ce sont les premiers rires. Les premiers applaudissements au milieu d'un sketch. Les premières réactions positives d'un public que je connaissais en partie, et que je devais convaincre d'un autre. Je me souviendrai l'impression de fierté quand ce que je j'écrivais sur ce même ordinateur ne faisait même pas bouger mon sofa, ni rire ma table basse ni pleurer mon bureau.

Le lendemain, j'ai réalisé. Je venais de faire la chose dont je rêvais depuis bien longtemps. J'étais monté sur scène, j'avais proposé un spectacle entièrement à mon image. Le trac avait fait place à l'envie de monter sur la scène et d'offrir à tous ce que je considérais moi comme le meilleur de moi-même.

Et puis je me suis vu en vidéo. Je me suis trouvé à chier. J'ai ré-entendu les rires qui m'ont encore plus touché car là, je pouvais y prêter attention.

Je me suis demandé pourquoi les gens avaient aimé. Je me suis dit que décidément, j'étais loin d'être un artiste, et qu'il me faudrait bosser, et cravacher pour y arriver (si tant est que je souhaite y parvenir).

Je me suis dit que je ne savais pas s'il s'agirait de mon dernier spectacle, mais je réalisais que c'était le premier, et que ça, je ne le revivrai plus jamais...


Publié dans Vie quotidienne

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B
<br /> Tu sais quoi, pendant mon zapping fou à l'instant... j'ai regardé un reportage chez Morandini, ça s'appelait "Sophie Davant... du rire aux larmes"... je pense que tu as déjà des droits d'auteurs à<br /> récupérer, non ? ^^<br /> <br /> <br />
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G
<br /> <br /> Effectivement, il s'agissait d'un zapping fou pour finir sur Sophie Davant!!!<br /> <br /> <br /> Je vais réfléchir à une suite judiciaire, parce que là, je trouve qu'elle abuse la Sophie!!!<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> super fier d'etre ton oncle super fier que tu sois content de ton actuaction<br /> <br /> <br />
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G
<br /> <br /> Super fier de ce commentaire... <br /> <br /> <br /> <br />